Randonner avec la caravane de dromadaires

Il est possible de faire de nombreux treks en République de Djibouti mais je crois que celui de l'Oued Kalou est l'un de mes favoris. Passer le week-end à randonner aux côtés de la caravane de dromadaires, manger les meilleures frites et khamir (beignet djiboutien) de ma vie au milieu de rien, dormir à la belle étoile bercée par le vent qui s'engouffre dans la moustiquaire, me rafraîchir dans les piscines naturelles que la nature offre en cours de route, passer des dégradés de marron de l'oued au turquoise du lac Assal, cela a quelque-chose d'unique.

J'ai en effet eu la chance par deux fois de traverser l'Oued Kalou, sur les pas du poète Arthur Rimbaud et du romancier Joseph Kessel, qui le décrit comme des "gorges sculptées par les démons ". D'autres avant nous ont également foulé ce sol sableux et cette roche brûlante : les esclaves et leurs marchands, les trafiquants d'armes ou encore les caravanes de sel.

Chaque excursion est sans doute propre au guide ou à l'agence de voyage qui vous accompagne ainsi qu'au type de trek choisi, mais cet article porte sur le nomado classique proposé lors de notre expatriation entre 2022 et 2025. Un peu moins d'une vingtaine de kilomètres à parcourir sur un après-midi et une matinée vous attendent donc ; mais encore faut-il que votre dos résiste aux cahots de la piste qui vous sépare du point de départ du trek. Vous démarrez ensuite la randonnée aux pieds des dromadaires, presque à l'ombre d'un acacia, à Allouli. Vos alliés du désert sont prêts à être chargés de vos affaires et vont porter votre bivouac tout du long : mieux vaut tout empaqueter en sac poubelle pour que votre nuit en lit picot n'en garde pas l'odeur et prévoir léger pour les épargner. Après l'incroyable jeu de Tetris sur les flancs de vos compagnons de route, la caravane s'élance, sous le soleil de plomb qu'offre l'hiver djiboutien.

Le premier jour vont défiler tour à tour les palmiers, les parois rocheuses et les vasques d'eau émeraude. La dernière ascension de la journée permettra quant à elle d'élire domicile sur un plateau où le soleil se couchera en même temps que les dromadaires. Vous monterez votre campement, vous régalerez certainement de sauce patate, écouterez les histoires locales de votre guide, ferez une toilette de chat et vous endormirez à la lueur de la lune avec l'odeur du feu de bois.

Le deuxième jour, le soleil se lèvera doucement sur votre bivouac qu'il sera déjà temps de tout remballer, boire un thé chaï djiboutien et renfiler vos chaussures de randonnée. Dromadaires arnachés, petit-déjeuner local englouti, vos pieds certainement fatigués des kilomètres avalés la veille, la fin de l'Oued vous attend patiemment pour être traversée. Ce sont encore quelques heures de marche qui s'annoncent, et de plus en plus chaudes, mais bientôt vous verrez l'horizon se colorer d'un blanc cygne comme vous n'en avez jamais vu. Très vite sous vos pieds, la banquise de sel du lac Assal se fera dérouler.

Le programme de votre randonnée vous permettra peut-être de prendre le temps de vous plonger dans les nuances de cyan du lac Assal, qui est le point le plus bas du continent Africain et l'un des lacs les plus salés au monde. Après vous être bien rincés de votre ̶b̶a̶i̶g̶n̶a̶d̶e̶ flottaison, vous pourrez faire le plein de sel aux marchands qui étalent leur récolte sur le parking, admirer les dromadaires qui se reposent de leur périple et vous mettre en direction des sources chaudes de Korili. Les températures et émanations de ces dernières peuvent cependant avoisiner les 90 degrés, nous vous recommandons donc d'être très prudents et même guidés pour la première fois. Vous pourrez néanmoins profiter d'une fish pédicure gratuite et bien méritée puisque l'un des bassins de la zone offre une eau claire, à température idéale et remplie de petits poissons prêts à exfolier vos doigts de pieds.